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L'homme est-il un animal sympathique (fin) ?


Il y a donc deux chemins, l'amitié ou la violence. Lequel vaut le mieux ? L'amitié, bien sûr. Que serait une seule de nos journées où nous serions entièrement en proie à la jalousie, à la colère, au ressentiment ?

C'est ce que dit Matthieu Ricard dans ses méditations bouddhistes. Il ne dit pas qu'il faut se sacrifier pour les autres ou pour Dieu, il dit que si nous ne voulons plus souffrir, nous avons tout intérêt à nous convertir à la bienveillance envers autrui, à nous réjouir de ses bonheurs, à l'aider dans ses entreprises. Tout intérêt !

Personnellement, cela recoupe entièrement ce que j'ai compris il y a des lustres en lisant Paul Diel, Pierre Leroux et Marcel Mauss. C'est une petite, ou plutôt une grande révolution dans notre culture car pendant 15 siècles, l'Église catholique a enseigné le sacrifice et a dit que l'amour de soi était un larcin, un vol fait à Dieu, seul digne d'être aimé. Je compte depuis Saint Augustin, celui des Pères de l'Église qui a eu le plus d'influence. Les choses se détendent un peu depuis Vatican II.

La vérité est qu'on ne sort jamais de l'égoïsme, mais qu'il est d'un égoïsme conséquent de préférer la bienveillance à la malveillance car l'amitié est le plus réjouissant des sentiments, ces formules sont de Paul Diel.

Paul Diel invite à l'introspection, ou plutôt, il fait remarquer que, de toute façon, nous passons la moitié de notre vie à repasser le film de nos journées en jugeant nos conduites et celles des autres, mais nous le faisons le plus souvent de façon confuse, partiale, complaisante. En notre faveur, bien sûr ! Dans le fracas actuel de la communication, quelles voix nous invitent à transformer nos introspections obnubilées en une introspection élucidante ?

Reste un gros problème, c'est que si l'introspection lucide permet d'améliorer nos relations avec nos proches, cela peut très bien aller de pair avec une complète indifférence envers le bien public. Il y a une différence d'échelle, un saut quantique. Les plus terribles criminels de la mafia peuvent être de grands sentimentaux doués d'un vif sens de la famille. Nous sommes tous plus ou moins comme ça, solidaires avec nos proches (quand nous le sommes !), mais beaucoup plus utilitaristes avec le monde extérieur : voyez les guerres, la corruption, la surconsommation.

Là, c'est à la Némésis de jouer. Quand elle n'opprime pas, la Loi libère. Les hommes sont assez sages parfois pour se soumettre à des lois restrictives à condition que tout le monde en fasse autant. Le respect du code de la route en est un bon exemple. Ce peut être une loi non écrite, les tabous des anciennes sociétés, ou la loi démocratique décrite par Rousseau, qui met fin à un état de nature dangereux pour tous en soumettant chacun aux mêmes règles.


Photo : Un thé à la menthe Aux folies, à Belleville.

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