Les retraites : y voir des deux yeux
Le sujet est trop technique pour que je puisse soutenir une opinion assez étayée. Deux considérations me viennent cependant à l'esprit. D'abord, il y a un donné, dont personne n'est vraiment responsable car c'est la marche des choses qui l'a voulu, c'est qu'on ne vit plus 60 ans mais 80, voire beaucoup plus, avec toutes les conséquences qu'on sait. Et ce donné, disons biologique, se dédouble d'un autre donné, sociologique, celui-là. C'est que la moitié des couples se séparent. Il faut dès lors multiplier par deux les surfaces habitables, les factures d'électricité, de gaz, les abonnements, les taxes d'habitation et foncière, le budget déplacement pour la gestion des enfants, etc. Problèmes de budget, de mètres carrés habitables, d'urbanisme, d'extension des villes et des transports.
Or non seulement on ne supporte plus de vivre en couple quand il y a de l'eau dans le gaz, mais on ne veut plus vivre avec ses vieux parents même si on les aime bien. C'est comme si on avait tranché de haut en bas la molécule sociale et puis encore de droite à gauche (je parle pour les droitiers), comme une patate qu'on coupe en 4. Contraste total avec le temps où trois générations vivaient en groupe compact sous le même toit avec le même budget et pour une durée plus limitée.
Cette division a un nom, la liberté, dont on parle bien à la légère quand on ne commence pas à souligner son ambivalence constitutive. Deuxième considération tout aussi incontournable, la crise écologique qui va nous obliger, de gré ou de force, à réviser en profondeur nos standards de vie.
C'est sous cette double contrainte que se pose la question des retraites.
Photo : Steve McCurry, Lyon, La Sucrière, févier 2018.