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Pour une écriture charnelle


Je ne sais pas vous, mon lecteur, mais moi, les écritures compliquées, prétentieuses et technologiques, je ne les supporte pas. Un type comme Lacan est à mes yeux disqualifié a priori. S'il a quelques chose d'important à nous dire, qu'il arrête de se cacher derrière son bafouillage ! C'est une grande partie de l'intelligentsia parisienne qui s'est mise à jargonner horriblement dans les années 60 et 70 au quartier latin, cédant au démon de la théorie et de l'hermétisme. Grâce à Dieu, ça s'est un peu calmé mais la scolastique, le pédantisme, la cuistrerie et le snobisme intellectuel sont des vices de tous les temps. On devrait mettre au pilori le premier qui utilise des mots grecs ou allemands, des mots de plus de quatre syllabes et qui se permet des phrases de 12 lignes interrompues par une longue parenthèse.

Le parler que j'aime, disait Montaigne, c'est un parler simple et naïf, tel sur le papier qu'à la bouche, un parler succulent et nerveux, court et serré, non tant délicat et peigné comme véhément et brusque. Et il continuait : Socrate donnait à son esprit un mouvement naturel et ordinaire, comme parle un paysan, comme parle une femme. Il n'a jamais à la bouche que cochers, menuisiers, savetiers, maçons.

Jésus aussi fréquentait des gens de toutes sortes, des pêcheurs, des percepteurs, des soldats, des curés (ceux de l'époque), des prostituées, des malades. Socrate à Athènes et Jésus à Jérusalem seront nos maîtres car ils se sont exprimés dans un langage tout simplement humain. Humain, ça veut dire qu'ils n'ont pas mis une barrière entre les intellos et le peuple, ni entre le corps et l'âme. Ils jettent un pavé dans une société antique qui excluait de la cité les esclaves, les femmes, les enfants, les métèques et les animaux. Oui, ça fait beaucoup de monde ! Ces bannis sont au contraire invités aux banquets de Socrate et de Jésus. Même le bœuf et l'âne entrent dans la crèche.La grandeur de Platon et des Évangélistes est de n'avoir pas trahi leur message en le mettant par écrit.

L'esthétique médiévale est grande car elle a représenté le peuple, le corps, la matière, le travail, jusqu'à Rabelais et à Montaigne. Les XVII° et XVIII° siècle ont au contraire rétabli une esthétique esclavagiste héritée d'Aristote en réservant la comédie au peuple et la tragédie à l'aristocratie et en instituant la tyrannie du bon goût. Le classicisme est une esthétique de classe comme son nom l'indique.

Germaine de Staël, Victor Hugo et le romantisme ont eu raison de protester et de réclamer un retour à une esthétique chrétienne. Je vous promets de reparler bientôt de Giono, le grand maître à mes yeux d'une écriture charnelle et populaire.

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