De Minorque à Majorque : fin de l'histoire
Après l’île de Minorque, ses kilomètres de murs préhistoriques et ses portails en bois de lentisque, toujours les mêmes, visite de l’opulente Palma. Que faire, quand on est un touriste, je veux dire pour meubler le temps inoccupé par celui qu’on passe entre les draps blancs des hôtels et à la table des restaurants, sinon visiter les monuments historiques et des musées ? On est tombés dans la Fondatio La Caixa sur une superbe expo égyptienne prêtée par le British Museum et la magie a repris : ces hiéroglyphes, ces tombeaux, ces bas-reliefs, cette mythologie, ce mystère d’une civilisation sûre d’elle-même, à nous incompréhensible…
À la porte de l’église San Francesco, dégoulinante d’or et de baroque plateresque, une vieille dame toute cassée appuyée sur sa canne, est sortie par une porte latérale pendant qu’un vieux prêtre bien chenu finissait de dire une messe devant une assemblée clairsemée de cheveux gris. Ultimes débris d’un culte catholique en voie de disparition, dont l’esthétique et la métaphysique ne font plus sens pour les visiteurs que les bateaux de croisière vomissent par milliers. Quel malheur !
On est ensuite entrés dans la Fundacio March qui expose des œuvres modernes en pleine absurdie, comme cette toile géante percée de deux trous dans lesquels l’artiste avait passé une cravate supportant une roue de bicyclette. Ou ces machines à écrire reliées à des batteries de voitures et sur lesquels tapaient des marteaux de mécaniciens. Quel âge avons-nous ?
Quand les symboles du culte catholique auront été complètement oubliés par les peuples européens post-historiques, les touristes examineront ces Christ et ces martyrs avec la même surprise et la même incompréhension que la nôtre quand nous examinons les hiéroglyphes et les momies.
C’est comme tous ces portraits de princes et de reines qui emplissent les musées, de seigneurs et de dignitaires, depuis l’antiquité jusqu’au XIX° siècle, altiers et raides dans leur fierté, dans leur honneur, sévères et imbus de leur position. Cette fois, c’est la position sociale qui dessine une ligne verticale doublant la verticalité catholique : toujours regarder vers le haut !
La sociologie et la métaphysique post-historiques sont horizontales (je n’ai pas dit à plat ventre).
À quand le prochain tour de kaléidoscope ?
Comments