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Pas de prophètes à Marseille ?



Bruno : Tu as bien dormi, Antonia ? Tu devrais goûter ces galettes de Sarrasin, c’est pas mauvais.

Antonia : Oui, c’est bon.

- Tu sais qu’au temps des Croisades, les Sarrasins, c’étaient les ennemis des chrétiens, les Turcs, les Infidèles, les hérétiques, les sectateurs du prophète ?

- C’est quoi un prophète ?

- Un prophète ? C’est quelqu’un qui parle beaucoup, sur les marchés en particulier, qui dit aux gens d’arrêter avec tous leurs péchés, de demander pardon à Dieu. Tu en as déjà vu des prophètes ?

- Non…

- À Marseille, y en a pas beaucoup. On n’en a jamais vu.

- Il y a la plage du prophète où on va pique-niquer !

- Oui, ben justement, c’est qui, ce prophète ? On n’en a jamais entendu parler. À Marseille, il y a des joueurs de pétanque, il y a des dealers, il y a des footballers, il y a des proxénètes, mais des prophètes, on n’en a jamais vu.

- C’est quoi des proxénètes ?

- Des maquereaux si tu préfères.

- Ah ! Il y a aussi des poissonniers.

- Exact. Pourtant, une fois, j’en ai vu un dans le métro, de prophète. J’avais pris le premier métro à cinq heures du matin pour aller à Marignane m’envoler pour le Caire. Le wagon était presque vide. Il y avait juste quelques ouvriers blacks et beurs avec leur petit sac du casse-croûte. Tout d’un coup, un prophète est entré et s’est assis en face de moi. Il avait un grand chapeau et des grandes moustaches. Il s’est mis à parler très fort en disant : « Les Marseillais sont des cons ! » Il l’a répété plusieurs fois. Personne ne disait rien. Les ouvriers regardaient la pointe de leurs souliers sur le sol rayé du wagon. Et puis il a dit : « Ou des poètes peut-être… Il y a beaucoup de poètes à Marseille ! »

- C’est vrai ?

- Bof… C’est plutôt le genre commerçant à Marseille. Et la maîtresse, est-ce qu’elle prophétise, quelquefois ?

- Elle dit que des âneries, la maîtresse !

- Ah oui ? Quel genre d’âneries ? Tu pourrais pas me donner un exemple ?

- L’autre jour, elle a dit que la campagne c’était pas bien parce qu’il n’y avait pas de voitures. C’est pas vrai : à la campagne, il y a des voitures. Et de une ! Et si y en avait pas, ce serait plus écologique. Et de deux !

- Hé ! T'as vu l'heure ? Hep, hep, hep. Ton cartable ! Le masque !

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