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Le cul par terre


Je vois deux choses différentes qui convergent vers le même résultat.

D’un côté, la crise d’adolescence provoquée par la puberté, cette orageuse révolution, comme dit Rousseau, déjà multipliée par l’allongement des études, le report de l’entrée dans la vie active et l’arrivée du premier enfant, est maintenant surmultipliée par les réseaux sociaux. La multiplication que j’ai évoquée, ce fut mai 68. La surmultiplication par instagram, etc., nous la traversons aujourd’hui sans pouvoir en connaître les effets car ce sont les adolescents d’aujourd’hui qui la vivent. Ce que je crois apercevoir, c’est la tyrannie de l’horizontalité, c’est-à-dire l’obsolescence du passé, programmée ou pas programmée, passé incarné par la parole du père, du prêtre et du maître depuis que le monde est monde. Cette parole n’est pas tant contestée dans son contenu, encore faudrait-il y accéder, qu’a priori : un aspirateur géant captive l’attention et l’affectivité adolescente, l’ivresse de la reconnaissance partagée procurée par ce qu’on appelle les réseaux sociaux.

Le wokisme s’attaque, lui, aux contenus. Les moteurs sont plutôt à chercher dans la génération des quarantenaires et ça essaime. Personnellement, je sais que j’essaie d’être woke comme Bouddha, le destructeur des castes, était éveillé. Le racisme et l’homophobie me sont insupportables et j’ai toujours placé les femmes sur le même plan que les hommes. Par contre, le wokisme, cette inflammation de la pensée woke me choque chaque fois qu’elle ne perçoit dans la tradition que bêtise et domination. Tout est dans le ne que comme chez La Rochefoucauld. Ne que, ne que, ne que, répète en boucle le wokisme

Les deux inflammations se rejoignent pour conduire, comme les parallèles à l’horizon, à l’abolition du passé (donc de l’avenir) au profit d’un éternel présent constitué d’individus identiques et libérés qu'aucun point sublime ne surplombera. Alors, de deux choses l’une. Dans le meilleur des cas, ce sera le bonheur pour tous, dans le pire, on se retrouvera tous le cul par terre, c-à-d décapés des règles, tabous, rituels, limites, pudeurs, honneurs, préjugés, habitudes, etc., sédimentés par des millénaires de civilisation. Quel champ immense ouvert à la guerre de tous contre tous…

Après tout, je n’en sais rien mais, personnellement, c’est d’une main tremblante que je toucherais aux choses.

Photo : le monument aux morts de Nice.

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