Un Apollon mongol
Je me suis dit que pour un début, j’avais visé un peu trop bas dans mon dernier billet de stylistique, alors je rectifie le tir et vise un peu plus chaud cette fois. Et ne me dites pas que c’est la belle mine de Muriel qui m’a séduit : ma précédente conquête s’appelait Michel Houellebecq qui ne passe pas pour être l’Apollon du Belvédère. Muriel a 24 ans quand elle raconte son voyage au Népal. Elle s’est fourvoyée dans un bar américain quand :
Un grand Mongol me regarde, penché sur le bar, un verre à la main. Genghis Khan parmi les blancs. Une terrible gueule, des yeux bouddhiques très enfoncés sous une paupière en forme de longue virgule, un regard aussi cruel que celui du chat que je caresse, des pommettes saillantes à faire péter la peau, des lèvres épaisses à bouffer de la viande crue, un corps si beau que j’ai envie de le dessiner. Quand il lève la main pour prendre un verre, il fait un chef d’œuvre. Quand il passe sa langue sur ses lèvres, on n'a plus qu'à se mettre à genoux. La beauté absolue finit par inquiéter et puis la perfection se met à bouger et les doigts vous démangent de toucher, de sentir, de manger comme un gâteau. Toute une chimie se met à bouillonner dans mes alambics, une explosion de chaleur éclate dans mon ventre. J’ai la grande maladie, le délicieux virus. J’ai envie de le lécher, de le digérer, une vraie envie qui commence par bourgeonner et fleurir en bas, du côté ovarien, puis monte comme un lotus sur sa tige, s’enroule autour du sexe, monte en vrille jusqu’à la tête en passant par la moelle épinière et s’épanouit en bouquet divin avec musiques et parfums, de la sève, de la confiture de rose, de l’ambroisie me coulent dans les veines.
Photo : copie romaine d'un Apollon sauroctone par Praxitèle, découverte tout à l'heure dans la Chapelle des Jésuites dans Avignon déserte.
Comments