Un peu plus d'horizontalité...
Hier, Faustine a été baptisée selon le dernier souhait de sa grand-mère de Bogota. Dans un monde marqué par une totale déritualisation, en ce moment de retour à l'état sauvage où personne ne courbe plus la nuque devant rien, j'approuve de voir des enfants faire une entrée solennelle dans quelque chose de plus grand qu'eux. L'office était célébré par Frère Louis, un jeune dominicain dynamique portant la barbe. Dans la voiture, j'ai dit à Vincent que c'était une belle cérémonie mais que, quand même, j'avais trouvé que Frère Louis avait beaucoup évoqué la foi, la prière et le Seigneur et pas beaucoup la relation des hommes entre eux, avec les animaux aussi.
Vincent m'a conseillé de fonder une nouvelle religion. Je lui ai répondu que c'était inutile, vu que cette religion existait déjà, qui enseigne la charité et dont le héros né dans une crèche était entré à Jérusalem sur le dos d'un âne.
Après, Sabine et Daniel avaient organisé une petite réception dans leur jardin à laquelle participèrent plusieurs membres de notre famille colombienne et... Frère Louis avec sa belle tunique blanche et son chapelet au côté. Je me suis installé près de lui, je l'ai remercié pour ce beau baptême et nous avons un peu causé. Il a convenu que sur la centaine d'assistants à qui il s'est adressé, il devait y avoir une majorité de personnes qui n'avaient pas la foi, à qui les injonctions à adorer le Seigneur ne disaient sans doute pas grand chose et qui attendaient surtout la fin de la cérémonie pour se dégourdir les jambes et les langues. Comment les toucher ? J'ai parlé en faveur d'un peu plus d'horizontalité. Il n'était pas contre et m'a même demandé simplement comment je m'y prendrais à sa place. Je fus pris de court car j'ignore quel est le protocole fléché, le mot est de Rafi, d'une messe de baptême. Il m'a dit aussi que chez les Dominicains, on s'efforçait de promouvoir le dogme. Fort bien, mais alors, c'est peut-être le dogme qu'il faudrait interroger en essayant de viser un peu plus bas. L'essentiel de l'Évangile n'est-il pas tourné vers le charnel, la vie privée, les petits ?
Frère Louis a justement tiré un Évangile de sa poche et m'a relu Matthieu 25 où Jésus dit que chaque fois qu'on donne à manger à un affamé, qu'on désaltère un assoiffé, qu'on visite un prisonnier ou un malade, etc, c'est à lui qu'on le fait et que chaque fois qu'on ne le fait pas, c'est à lui qu'on ne le fait pas.
Voilà peut-être de quoi toucher les esprits embrumés... Au moment où les rivalités humaines sont en train d'épuiser la planète et la démocratie un peu partout, les plus belles paraboles de l'Évangile sont bien opportunes quand elles nous disent de baisser un peu la garde, de rentrer en nous-mêmes et de faire taire nos sentiments d'envie. Voilà par où je commencerais pour attaquer les mécréants.
Quand j'ai demandé à Frère Louis pourquoi il n'avait pas parlé de la biodiversité et des insectes, il m'a fait remarquer qu'il avait recommandé aux catéchumènes de ne pas se traîner sur le sol comme des chenilles, mais de prendre leur envol de papillon. Faustine l'avait bien noté et m'a dit qu'elle s'attendait à ce que je le lui ressorte.
Image : vu dans un musée de Copenhague.
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